Du champ du Hack!

Echange avec  Raphaël Cuir, extrait:

RC: …en quoi les projets LaMine et le LEEM relèvent du hack ?

PGP: Voilà une question. Dans les deux cas je les classe dans le hack à cause du détournement, des outils, de la méthode, et du partage:

– pour ce qui est du détournement ça pourrait être assez en accord avec Jude Milhon qui définit le hack comme “Le contournement intelligent des limites imposées…”. Le LEEM transforme une machine fabriquée uniquement pour extraire du miel en afficheur de textes participant à un geste artistique. LaMine, c’est le détournement des abeilles pour faire des données, mes petites conf avec tableau noir, ou ma ruche-valise pour repartir d’Arbeost à San-Francisco*, c’est aussi le détournement de capteurs et de techniques inventés pour l’industrie pour faire un système libre de suivi des ruches, qui pour 10 fois moins cher que les modèles du commerce (et de manière10 fois plus précise) permettra aux apiculteurs de suivre la santé de leurs ruches à distance et aux scientifiques de comparer les résultats des données grâce à une base de données publique, on peut même se le fabriquer ou se les faire fabriquer car tous nos plans et notre code sont en licences libres.

Les outils, à LaMine la plupart de nos outils sont libres: en logiciel on utilise du linux pour les ruches, du linux sur nos serveurs, dans nos ordinateurs avec lesquels on code, la base de données est une CouchDB, nos cartes électroniques c’est du Arduino, notre hébergeur c’est Aquilenet une association qui fournit de l’internet libre, même les graphismes sont faits avec des outils libres (inkscape, gimp, Latex…) et sous licences créative common. De même pour le LEEM, depuis le début j’aurais pu choisir d’utiliser MaxMSP ou du logiciel sous licence comme ça qui simplifie la vie mais empêche de faire tellement de choses…
Des outils sur mesure: je compte aussi dans la démarche de hacker de faire ses propres outils parce que ça implique deux choses: de découvrir et de comprendre ce que l’on modifie, c’est un peu comme la différence entre lire et écrire, celui qui lit peut ne rien comprendre au texte, mais pour l’écrire il faut comprendre un peu ce qu’on fait…

La méthode, Pour cette machine j’ai soudé 900 leds et autant de résistances une par une, découpé les plaques des circuits imprimés à la main, et pourtant je ne crois pas au mérite de la souffrance (ni même à aucune forme de justice distributive alors vous imaginez le labeur…), j’ai du modifier cette machine vraiment pas faîte pour alors que j’aurai pu créer une machine selon les techniques industrielles actuelles et faire faire les circuits imprimés en industrie, mais tout ça aurait nécessité de tout planifier de A à Z et je ne sais pas travailler comme ça, au lieu de fixer un objectif et de tout faire pour y arriver, je regarde autour de moi et je me dis qu’est-ce que je fais avec ça, et même quand je j’énonce un objectif, j’espère surtout trouver en chemin autre chose qui

Le partage, sur tout le langage qui est produit dans LaMine (openBeeLab compris) comme dans le LEEM, tout est en licence libre, les plans les idées, les images, tout… Je profite tous les jours du partage non marchand du savoir, internet m’a permis, moi qui suis d’origines humbles de découvrir tant et tant de connaissances dont je n’aurais pas pu payer même la couverture du livre. Les internets c’est pour moi comme le manteau du colporteur du XVIIIème qui diffusait à la fois les ouvrages pornos, philosophiques  et politiques, bref que des trucs interdits.  Et à la question: “mais comment comptez vous en vivre alors si on pirate vos oeuvres? “, je réponds c’est le contarire, arduino qui diffuse tous les plans de ses cartes et de son code en llicence libre, permettant même à ses concurrents de vendre les même deux fois moins cher vit très bien et pour deux raisons: 1- parceque plus le concurrent en vend plus arduino env vend aussi 2 – parce que sinon leur invention serait restée dans un putain de placard alors que son ouverture en a fait un des standards mondiaux du prototypage, et bien sûr je ne parle pas du sens… Des millions de lignes de code produites par des anonymes et partagées librement qui permettent au premier fou de faire des ruches électroniques ou pire encore…

Bon pour conclure, je me sens plus proche de “a hacker Manifesto” de McKenzie Wark et des Chaos Computer Clubs que des Fablabs et de leur charte bien propre du MIT.

Et si je vous le dis franchement je classe tout mon travail en hack, parce que détourner du langage et le partager,  pour moi c’est du Hack, mais pire à mon sens c’est pas parce que le hack  existe que j’y crois, mais c’est parce qu’on y croit qu’il ek-siste.
Merci de m’avoir donné l’occasion de formaliser un peu ça.
Bien à vous.
P.G.P.